(Note de lecture), Marcella, La Sorcière ne ment jamais, par Chloé Landriot
Que représente la poésie dans ta vie ?
Tout ! C’est quelque chose qui est là, de manière constante : je ne peux pas envisager une vie sans poésie. Je vois la vie en poésie, c’est pour ça que je vis. Tout est poésie, la vie est poésie. C’est presque une question de survie. Très tôt, j’ai lu, écrit, c’est devenu une manière d’être. C’est une liberté tellement immense.
C’est quoi la sophrologie ?
On dit souvent de la sophrologie qu’elle est une méthode psychocorporelle. Pourtant, la sophrologie s’intéresse avant toute chose au corps et à sa géographie. Si on parle d’une méthode à médiation corporelle, c’est qu’elle passe par la conscience du corps, de ses mouvements, de ses postures, de ses sensations et ressentis. Elle propose des exercices très simples, dont certains sont issus du yoga, pour nous aider à reprendre contact avec notre corps, nous déconnecter du mental et de ses pensées encombrantes génératrices de tensions. Cet état de détente ouvre un espace nouveau dans lequel il devient possible d’agir en conscience, de manière plus constructive. Au fond, la sophrologie recourt au corps pour laisser émerger une pensée élargie.
Quel lien fais-tu entre poésie et sophrologie ?
Ces liens sont arrivés très vite, comme une évidence. J’écris depuis très très longtemps et mon écriture tourne toujours autour du corps. C’est un sujet d’étude et une préoccupation première. Ce n’est pas pour rien que j’ai opté pour la sophrologie ! Dès mes débuts, j’ai eu envie de rapporter mes expériences de sophrologue dans des livres.(…) Dans ma pratique, mes guidances sont très imprégnées d’une certaine forme de poésie.
Tu travailles au Samusocial de Paris, en quoi cette expérience a-t-elle nourri ton écriture ?
Toutes les expériences de ma vie nourrissent mon écriture. Je me nourris de l’extérieur. Tout m’inspire. Et cette expérience-là est quelque chose de très puissant et bouleversant, parce qu’il m’a été donné de rencontrer des êtres lumineux, des personnes qui vivent des expériences extrêmes : des femmes à la rue, qui ont vécu des déracinements, des exils, des violences physiques et morales, des problèmes de santé…
Ces femmes ont tant vécu qu’elles sont devenues très fortes. Ce sont des modèles. Elle ne se plaignent pas. Ce sont des vraies guerrières de lumière. Être à leur contact me donne beaucoup de gratitude. Elles m’apprennent énormément. Elles ont de la gratitude pour moi parce que je leur apporte ces techniques qui leur redonnent confiance dans leur avenir et leur potentiel. J’ai une vie très différente de la leur, une vie confortable, mais lorsque je suis avec elles, ce sont mes sœurs. Il n’y a aucune différence entre elles et moi, ou la seule différence, c’est qu’elles ont plus de puissance que moi. Elles ont tant traversé, elles se sont tant battues… Les instants qu’on passe ensemble m’ont amené une conscience de ce que peut être l’humanité.
Mais bien sûr, pour elles, rien n’est simple. Elles perdent confiance. Mon travail est de leur dire : « C’est comme ça aujourd’hui, mais hier ce n’était pas comme ça, et demain, ce sera différent ». C’est un travail commun où chacun met de soi.
Tu viens de faire paraître La sorcière ne ment jamais et tu animes des ateliers d’écriture autour de ce livre. Peux-tu nous en dire plus ?
En effet, je commence un cycle d’ateliers de sophro-poésie autour de La sorcière ne ment jamais. Tous les quinze jours, les femmes lisent les textes du livre et travaillent sur la « sorcière » qui est en chacune de nous. En tant que femme, quel est mon vécu de sorcière ? On est d’abord dans la parole, dans l’échange oral. Quel texte me touche le plus et pourquoi ? En quoi ça me parle ? Qu’est-ce que je ressens quand je lis ça ? Puis on passe à l’écriture, on se demande : quelle sorcière je suis ? Le but est d’écrire un autre livre à partir de ces ateliers.